Le concept de la «lune de miel»
À la suite d’une série de sondages que j’ai proposé sur ma chaîne Youtube “immigrer au Canada” j’ai rassemblé l’avis de nouveaux arrivants sur différents facteurs de la vie quotidienne au Québec. Le but était de déterminer si cela pouvait représenter de nouveaux défis ou au contraire si cela s’avérait bien plus simple que prévu, tout du moins en termes d’acclimatation.
Avant de commencer sur les résultats, ce qui donnera une vision plus étendue puisque reflétant l’avis d’une cinquantaine de participants, il est important de revenir sur le concept de la “lune de miel”.
En effet, en tant qu’immigrant nous connaissons tous cette phase, à laquelle il faut prendre garde, la plupart du temps au bout d’environ une année. Il s’agit de ce moment où la dimension de nouveauté et d’émerveillement, dit ici à juste titre “la lune de miel”, s’estompe au profit du quotidien, de la routine. On a alors tendance à oublier les raisons pour lesquelles nous avons décidé de refaire notre vie dans un autre pays, en l’occurrence ici le Canada. Il nous revient en tête les bons moments de notre vie passée, les côtés agréables de notre terre natale (l’absence d’hiver par exemple).
Le piège est le même pour tous, car le retour en arrière signifie clairement un retour vers les raisons pour lesquelles nous avons décidé de partir en premier lieu. Un retour en arrière est dans la majorité des cas synonyme de déception, puisque les difficultés du quotidien réapparaissent aussitôt et avec la même vigueur. Alors c’est là où il faut faire preuve de force morale. Il faut savoir se ressaisir et contrecarrer les désirs de la nostalgie qui a toujours tendance à évincer les côtés sombres d’une histoire vécue. Il faut se raisonner et identifier tous les arguments qui nous ont poussé à refaire sa vie au Canada. Il faut être honnête avec soi-même.
On passe tous par là, c’est pourquoi il est toujours capital de bien mesurer les pours et les contres.
Les résultats des sondages
Première Question
“Comment perçois-tu l’hiver au Québec?”
(66 votes)
- « Ça ne me dérange pas » = 91%
- «J’en ai marre !» = 9%
Les commentaires sont plutôt en faveur de l’hiver, qui est perçu comme un bon moyen de s’exercer à différentes activités sportives en plein air, par exemple le ski.
Il est vrai que pour les férus de sport hivernal, le Canada est un petit paradis. Presque toutes les activités praticables en hiver sont accessibles au pays, certaines même assez facilement. Entre les randonnées en forêt, la pêche sur glace, les balades en motoneige, la raquette, le patin, le snowboard, le ski de fond, et bien d’autres encore, il n’y a que l’embarras du choix !
Mais l’hiver ne correspond pas qu’à des activités plaisantes. Il ne faut pas oublier que l’hiver est avec nous au quotidien et peut s’avérer être une contrainte plus ou moins lourde dans la vie de tous les jours. L’hiver c’est en effet aussi : pelleter, et pelleter encore et encore, changer ses pneus deux fois par année, monter son abris “Tempo” (cette fameuse tente blanche permettant d’abriter son véhicule des intempéries), les chutes sur le sol glissant, les fermetures surprises de l’école, les embouteillages en raison des routes mal déneigées lors de ces mêmes journées de tempêtes… bref tout paraît moins simple. Sur le long terme, après plusieurs années vécues au Québec, ce quotidien peut peser vraiment lourd sur le bien-être. Il faut s’armer de patience, et apprendre à accepter l’hiver comme un élément immuable du côté ordinaire de la vie.
Deuxième Question
“Comment as-tu vécu tes premiers jours au Canada?”
(69 votes)
- « Très bien ! » = 25%
- «Un peu d’adaptation» = 62%
- «Très perdu » = 13%
Dans les faits, même si l’on est bien préparé, changer de pays, de culture, de continent, etc…, ne peut se faire sans ressentir un certain déracinement. Il y a nécessairement une adaptation à expérimenter, qu’elle soit matérielle ou dans une reconstruction de certaines valeurs fondamentales, souvent même les deux. On ne se prépare jamais suffisamment avant de changer de vie.
Aussi il est important une fois installé au Canada d’établir de nouveaux points de repère très rapidement afin de ne pas être trop perdu. Passer par un processus d’adaptation n’est pas un défi infranchissable, mais il est important de mettre en place des stratégies afin que ce sentiment de désorientation ne devienne pas être un obstacle insurmontable.
Troisième Question
“Qu’est ce que tu penses de la bouffe au Canada?”
(74 votes)
- « Pas de problème ! » = 20%
- « Il a fallu s’adapter »= 64%
- «Un vrai problème … » = 16%
Personnellement, j’ai trouvé ce commentaire de Clément très pertinent sur le sujet :
“Sali Salut , il a fallu s’adapter sur certaines nourritures, mais pour moi et ma compagne nous cuisinons beaucoup et cela ne change pas nos habitudes au niveau des plats. Nous stockons plus ( merci Costco et grand frigo ), nous achetons en gros, et cela nous simplifie la vie. Par contre, nous avons du faire une croix sur notre fromage et le pain, des fois un petit caprice mais ça coute vite cher, mais les fromages ici sont assez bon donc ça compense pas mal (j’ai juste du mal a acheter du Boursin à 9 dollars CA xD). Mais dans l’ensemble, nous mangeons bien ici, assez équilibré, mais cela nous coûte plus chèr qu’en France”
Bien sûr, on retrouve au Canada des différences dans les prix, dans les quantités, voire même dans la désignation de certaines marques. En revanche, globalement les habitudes alimentaires ne varient pas énormément si l’on sait s’adapter. Et c’est sans compter que le Canada a toujours été pays multiculturaliste, ce qui implique qu’il n’est pas rare de retrouver des rayons consacrés aux produits d’autres parties du monde dans les supermarchés.
Quatrième Question
“Es-tu satisfait professionnellement depuis que tu es au Canada?”
(36 votes)
- « Très satisfait.e ! » = 47%
- « Mitigé » =50%
- «Très mécontent.e» = 3%
On voit clairement ici que l’opinion est franchement partagée. Bien sûr, c’est avant tout du cas par cas. Mais il est indéniable que l’état d’esprit compte pour beaucoup. Si l’on part du principe que l’on change de pays, que l’on va plus que probablement devoir faire ses preuves, que l’on va peut-être même devoir retourner provisoirement au bas de l’échelle, alors l’adaptation n’en sera que plus facile.
Il ne faut surtout pas tomber dans le piège de “l’Eldorado”, celui où l’on croit que la vie au Canada sera nécessairement plus aisée, moins contraignante, et où le succès sera à notre portée en vertue de l’importance de notre pays d’origine ou de notre expérience professionnelle passée.
D’autre part, il faut garder en tête qu’un permis de travail fermé, soit pour un unique employeur dans une région spécifique, n’impose pas les mêmes conditions de vie qu’un permis de travail ouvert. Il est alors capital de s’informer sur ses droits en tant que travailleu.r.se, et de veiller à les faire respecter afin d’éviter toute forme d’abus.
Cinquième Question
“Comment gères tu l’éloignement avec une partie de ta famille depuis que tu es arrivé(e) au Canada (si tu as de la famille qui réside encore dans ton pays d’origine bien sûr)”
(73 votes)
- « Tout va bien! » = 36%
- «Il y a des moments difficiles»= 49%
- «C’est très difficile » = 15%
Bien entendu la séparation peut être très difficile, et elle peut même parfois s’accentuer alors que l’on modifie nos valeurs afin qu’elles correspondent à notre nouveau pays d’adoption. Le sentiment de déracinement s’en retrouve exacerbé. On peut avoir la sensation de naviguer entre deux réalités impossibles à concilier.
Encore une fois, le plus important est de se recentrer sur ses objectifs, et de s’y tenir. Si le retour vers la famille est essentiel pour le bien être, alors la question ne se pose pas. Si en revanche le bien être est avant tout situé dans cette nouvelle vie, alors il faudra savoir composer avec l’éloignement de la meilleure manière possible, par exemple en nouant de nouvelles amitiés et en trouvant du soutien local. Le but est de s’accomplir en tant qu’individu, sans se torturer soi même inutilement.
Il s’agit d’une démarche très personnelle, mais elle est souvent plus facile si l’on peut s’appuyer sur une nouvelle communauté d’appartenance.
Sixième Question
“ As-tu réussi à t’insérer dans une vie communautaire depuis que tu es au Canada? (activités sportives, bénévolat, participations à certaines activités municipales gratuites, vie de quartier…etc) “
(41 votes)
- «Oui, j’ai une bonne expérience » = 46%
- «Non, pas vraiment » = 54%
Les commentaires étaient à l’image du vote, soit très partagés. Certains mentionnent n’avoir vécu aucun problème de ce côté là et qu’il était très simple de se faire des amis, que ce soit en tant qu’étudiant.e ou travailleu.r.se .
Au contraire, d’autres soulignent le fait que la recherche d’emploi et le suivi des papiers administratifs en lien avec les processus d’immigration étaient “chronophages”, et qu’il est en conséquence difficile d’entrenir une vie sociale en parallèle.
La réalité se situe sans aucun doute entre ces deux vérités. Le travail ou les occupations quotidiennes offrent de multiples opportunités de connecter avec bon nombre de personnes. D’un autre côté, il est évident que les premiers mois d’installation ne procurent pas beaucoup de plages horaires vacantes à consacrer aux rencontres sociales, vu les responsabilités qui incombent dans les processus d’intégration.
Comme toujours il faut s’armer de patience et de courage pour savoir s’ajuster au besoin.
En conclusion
L’adaptation et l’humilité sont sans conteste les maîtres mots d’une bonne intégration à la société canadienne. Il faut savoir faire preuve de ténacité et d’ouverture d’esprit, et ne pas être trop réticent au changement. Attention néanmoins à ne pas tomber dans le piège d’accepter de mener une vie aux antipodes de ce que vous désirez vraiment sur le long terme. L’intégrité et le bien-être ne doivent en aucun cas être mis à défaut par les abus professionnels ou autres. Connaissez vos droits en tant qu’immigrant.e, et si vous avez des doutes ou des questions, ne restez pas dans l’incertitude.
Sachez que certaines personnes mandatées peuvent vous aider à y voir plus clair, par exemple les avocats en droit d’immigration du Québec.